« Jeune femme qui aime la vie, voudrait rencontrer quelqu’un de sincère, ouvert d’esprit, qui aime sortir et n’a pas peur de s’engager », tel est le genre d’annonce que l’on peut trouver sur les sites de rencontre et de chat.
De plus en plus d’hommes et de femmes en mal d’amour, célibataires, ou non, recherchent à combler leurs manques grâce à des rencontres par ce biais, et ces sites connaissent un succès considérable.
D’où provient ce succès, que nous apprend-il sur l’état des cœurs ?
Dans notre société, où chaque individu vit dans sa « one life », sa vie individualisée, pleine d’amis, de sorties mais au combien formatée, les personnes ont du mal à aller vers l’autre. En effet, jamais on a était aussi entouré de personnes, baignée dans la jungle et la foule urbaine, et jamais l’individu n’a été aussi seul face à lui-même. Le prouvent les difficultés à s’adresser aux « étrangers » dans les transports en commun, à parler à son voisin surtout s’il n’est pas de la même génération, les difficultés à nouer des amitiés solides et durables. Dans le règne de l’éphémère, dans ces « temps hypermodernes » pour citer Gilles Lipodevsky, l’hyper mobilité est de rigueur et il convient avant d’être soi-même d’être à la mode. L’individu n’a jamais été aussi libre de ses choix, sans devoir rendre de compte à personne, et pourtant aussi contraint par l’image consensuelle que lui renvoie le miroir biaisé de la publicité mensongère. Oui, ce culte de l’image et de l’éphémérité est un gigantesque mensonge. L’individu pour se sentir bien doit en effet être en harmonie avec ce qu’il est profondément. Et ça notre société ne l’encourage pas vraiment, elle propose à l’individu le culte de l’apparence et de la performance au détriment de l’authenticité.
Ainsi, dans la recherche de l’âme sœur, les exigences sont devenues immenses et souvent elle se détache d’une quête d’amour authentique pour devenir la recherche du « produit idéal ». L’homme ou la femme doit être cadre, mesurer au moins 1,75 m, être ceci mais pas cela, avoir toutes les qualités possibles. Chacun fait sa promotion sur le Net avec un risque de publicité mensongère ! La marchandisation de l’amour va maintenant plus loin et il existe maintenant des sites « pseudo-féministes » qui proposent de faire ses courses et de mettre dans son panier les mâles qui nous plaisent. Et cela prétend revaloriser la condition féminine!
En réduisant l’homme à un objet, certaines croient que cela va faire progresser leur condition. Elles deviennent pires que les machistes et avilient l'Homme.
Au-delà de cet aspect, le plus choquant est la généralisation de la mentalité consumériste à tous les domaines. On voudrait nous faire croire que l’amour est désormais un produit comme les autres : il se coache, il se marquette, il s’entretient, et il se jette.
Bienvenue dans l’ère de l’amour jetable ! Ou l’ère du capitalisme triomphant.
Les personnes qui le pratiquent le font soit inconsciemment, prise dans le tourbillon de l’hypermodernité, où le manque de repères se fait cruel, soit elles sont carrément cyniques et dans ce cas, elle prennent la responsabilité en tant qu’individu libre d’entrer dans l’ère du jetable, et de définir la consommation et la matérialisme comme leurs valeurs suprêmes.
Face à cela, l’individu est-il obligé d’entrer dans cette ère ? peut-il encore ré
sister au modèle des relations jetables ?
Et bien non seulement il le peut mais il le doit, et le cynisme est dans ce cas condamnable car destructeur pour tout le monde. Quand on voit les chiffres sur la consommation d’anti-dépresseurs en France, les attitudes autodestructrices de beaucoup de jeunes, le désarroi des beaucoup d’enfants, et la solitude profonde de beaucoup d’hommes et de femmes, on peut s’interroger sur la pertinence de ce modèle de rapport à l’autre qui est actuellement prôné par notre société. Sa capacité à faire notre bonheur est plus qu’incertaine. Mais sa capacité à faire du profit est assurée.